La distillerie

Barrême et la petite fleur bleue

À quelques mètres de la Gare, se trouve une ancienne distillerie, qui souligne l’entrée au pays de la lavande. Construite en 1904 à proximité de la Gare, l’industriel de l’époque utilisait le train pour importer les plantes aromatiques à distiller.

Le pelage de la lavande fine ou Lavandula Augustifolia et sa distillation font partie de l’histoire de BARRÊME. Cette plante sauvage y a toujours poussé naturellement et son parfum fleuri, moins camphré que le lavandin était recherché par les parfumeurs de Grasse. Il existe toujours un label de qualité “lavande fine de Barrême”.

Cette ancienne distillerie de BARRÊME est l’un des sites patrimoniaux avec la MURE ARGENS, THORAME et ENTREVAUX, choisi pour accueillir dans le cadre du projet « Savoir-faire et faire savoir, à la découverte des patrimoines vivants du Pays », un espace muséographique.

L’objectif est de construire un produit de mise en tourisme du patrimoine culturel du Pays Asses Verdon Vaïre Var, avec pour axe principal : la ligne de Chemin de Fer de Provence.

Lavande Nostalgie…

“Ah! qu’elles étaient belles les montagnes fleuries de mon enfance à BARRÊME ! 

Dès juillet, les champs de lavande se coloraient peu à peu, faisant resurgir sur leurs flancs qu’ils découpaient, une géométrie bizarre de rectangles, de triangles de trapèzes, des bleus lilas, des bleus clairs, des mauves, des parmes, des bleus violets, changeant au gré de l’heure, de la lumière, du soleil, et bien sûr du mûrissement des fleurs et de l’avancée de la saison. Le long des chemins aussi, partout dans les vallons, au bord des sentiers, à la lisière des forêts de pins, dans les clairières, les adrets, les ubacs, les rocailles, dans les «robines» même, les lavandes sauvages poussaient, que les gamins de mon âge, faucille à la main et sac au dos, allions dès l’aube «peler» allègrement avec la gaieté et l’excitation des enfants…  

Et la fumée blanche qui s’échappait de la haute cheminée de briques rouges et couvrait le soir venu, à l’heure où «les grands chars gémissants» tirés par des chevaux, reviennent des champs, chargés des coupes de la journée, le village et la vallée de l’Asse de son voile bleuté, comment pourrais-je en oublier l’odeur ? Ce parfum, reconnaissable entre mille, du feu de paille de lavande épuisée, qu’on retrouve encore aujourd’hui, l’été, au hasard des routes quand on rencontre une distillerie traditionnelle…

 

1963 quelques années plus tard, c’était déjà la fin de la grande époque. En l’espace de vingt ans les champs de lavande disparaissent du paysage barrêmois. Les cinq distilleries de Barrême, toutes grassoises, les unes après les autres, ferment leurs portes. Il y avait, bien sûr, toujours les lavandes de Barrême, le top, mais la lavande bulgare, la sauge sclarée russe, les lavandins, pointaient sur les marchés… Après avoir planté, on arrache. Nouvelle mode, la lavande, c’est le parfum désuet des vieux messieurs…  

Alors, il reste le label lavande AOC de Haute-Provence, l’unique voie pour sauver la lavande fine vraie et ses terroirs. Dans les catalogues, sous le nom lavande Barrême, des catalogues offrent des qualités médiocres à des prix, il est vrai, qui le sont tout autant, insensés et suspects. La lavande AOC de Haute-Provence doit y figurer en bonne place, parce que la lavande demeure l’élément essentiel, incontournable, des eaux de toilettes masculines. Elle est le midi, la Provence, le soleil. Elle est à elle seule un parfum. “

Tiré de : Raymond Chaillan, de parfum en parfum…

Barrême et la Lavande : une passion toujours vivante

La distillerie de Barrême est une usine atypique par sa taille et son fonctionnement. Si la lavande a joué un rôle essentiel dans la première moitié du XXe siècle pour l’actuel Pays, les solutions apportées pour sa distillation sont restées, le plus souvent, sommaires. La distillerie de Barrême est un exemple unique d’implantation d’une véritable usine consacrée à la distillation de lavande.

Construits en 1905, les bâtiments initiaux sont particulièrement bien conservés. L’ensemble est constitué de l’usine (aujourd’hui une salle polyvalente), de la grande chaufferie (futur espace muséographique) dotée de sa cheminée et de l’ancienne résidence du Directeur, aujourd’hui une maison d’habitation. Lors d’un entretien visant à la collecte de mémoire, en 2012, deux anciens employés de la distillerie Mane de Barrême à des époques différentes : 1958 et 1970. Se souviennent : Bernard, étudiant à l’époque, se souvient de ses embauches estivales pour le chargement de la lavande dans le pays avant que la distillation ne commence.

Il décrit des journées de 16 heures, le collectage de la lavande et le dressage des tiges en « andins » dans la cour de la distillerie. André, lui, explique les différents postes à la distillerie, la chaîne de fonctionnement et les équipements de la distillerie (alambics, chaudière au bois ou au mazout, palan). Il se souvient de son travail dans une autre distillerie de Barrême qui fabriquait de la « concrète » à base de fleur de lavande et d’éther. Reviennent à sa mémoire également les entreprises Mane, Chery, Cavalier, Silvy et Selin, les cinq distilleries, et des différentes tâches autour de l’exploitation de la lavande (coupe, binage, distillation) rémunéré à la tâche, du droits de bans pour peler sur le terrain domanial (Eaux et forêts), comme du rôle des courtiers autour de Barrême. Ce n’est donc pas d’aujourd’hui que la ville de Barrême sent bon le sud, et la lavande. Et la municipalité compte bien utiliser son histoire autour de cette plante provençale.

 

Le projet de Musée de la Lavande est en passe de devenir un chantier. Et les premières pierres pourraient être posées d’ici peu. Pour le maire Jean-Louis Chabaud, c’est tout le passé de la ville qui doit être mis en exergue. « Dans ce musée, on va retrouver la petite industrie qu’il y avait à Barrême autour de la lavande. Au début du 20e siècle, il y avait cinq distilleries de grande importance.

Aujourd’hui, il ne reste que celle où le musée va être réalisé. L’objectif, sera aussi d’expliquer la place sociologique de la lavande dans le canton de Barrême. L’association les alambics ne pouvait pas y rester insensible, elle dont le but est de faire revivre le patrimoine de Barrême et développer ses atouts. Ces volontaires mettent un point d’honneur à récolter la lavande à l’ancienne, récolte se faisant en fonction de l’avancement de sa floraison, allant la chercher là où en subsistent encore quelques plans, pelant les pieds de lavande vers La Melle, Tartonne… là où cette plante sauvage y a toujours poussé naturellement afin de vendre l’essence récoltée au profit du Patrimoine Communal en vue de la réhabilitation de l’ancienne distillerie en musée.

Les recettes ainsi réalisées étant entièrement versées à l’Association du Patrimoine qui elle-même les reverse à la Commune pour le programme des travaux de réhabilitation. Le week-end dernier, la fumée s’est échappée de la grande cheminée de la distillerie, Les membres de l’association distillant les quelques 800 kg de lavande pour en tirer les 7 à 8 litres d’essence, que l’on retrouvera sur leur stand lors de la fête de la lavande 2015.

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